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Prospectus muet sur l'utilisation des fonds levés dans le cadre d'une augmentation de capital : manquement à l'obligation d'information du public

Affaires - Banque et finance
04/10/2017
Ont commis des manquements à l'obligation d'information du public un émetteur et ses dirigeants, signataires du prospectus relatif à une augmentation de capital avec maintien du droit préférentiel de souscription, dès lors que ce prospectus ne mentionne pas que les fonds levés serviront même partiellement à payer les arriérés de l'émetteur et à rembourser une avance consentie par son principal actionnaire.
Tel est l'un des enseignements d'un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 20 septembre 2017. L'arrêt d'appel (CA Paris, 29 oct. 2015, n° 14/14359) retient, d'abord, qu'à aucun endroit du prospectus ne figure l'information selon laquelle les fonds levés serviraient à payer des dettes fournisseurs relatives à la saison précédente ou à rembourser la créance d'une société à hauteur de 1 million d'euros. Il estime, ensuite, que l'expression « financer en partie la nouvelle saison d'achat » contenue dans le prospectus ne peut être interprétée comme signifiant a contrario que les fonds levés pourraient pour partie financer les "dettes fournisseurs" anciennes ou la créance de l'actionnaire ayant consenti une avance. Il retient, en outre, que les investisseurs qui ont souscrit à l'augmentation de capital étaient entretenus dans la certitude qu'ils apportaient leurs fonds à une société qui avait besoin de leur aide pour financer la continuité de son exploitation mais qu'aucune information du prospectus ne leur donnait à penser que ces fonds seraient utilisés, même partiellement, pour payer les arriérés de la société et rembourser l'avance de la société actionnaire principal.

Etait ainsi caché aux futurs souscripteurs le projet d'affecter 1 million d'euros, sur les 6,6 millions levés, au remboursement d'une avance, et une autre partie au paiement de dettes fournisseurs anciennes pour un montant, qui, pour n'avoir pu être précisément évalué, oscillait entre 100 000 et 200 000 euros et que ce dernier montant a été confirmé par le dirigeant de l'émetteur, lequel a déclaré que le paiement des factures anciennes représentait 2 à 3 % du montant total des fonds levés.

Ainsi, de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a souverainement interprété les clauses ambiguës du prospectus, a pu déduire, peu important la nature juridique et le caractère temporaire ou définitif des utilisations de fonds non mentionnées dans le prospectus, que l'information délivrée n'était ni exacte, ni précise, ni sincère.

Par Vincent Téchené
 
 
Source : Actualités du droit